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Actualité des entreprises

Insectes pollinisateurs : passer de la contrainte à la fierté !

Publication: Octobre 2019

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2e Assises nationales des insectes pollinisateurs : 25-27 sept 2019, Lyon...
 

Vendredi dernier se sont achevées les 2e Assises nationales des insectes pollinisateurs, organisées à Lyon par l’association ARTHROPOLOGIA. Lancés en présence d’Alain Giordano, adjoint au maire de Lyon, ces trois jours de travail répartis en ateliers dédiés aux milieux agricoles, urbains, naturels et aménagés ont rassemblé 250 spécialistes nationaux et même de Suisse et de Belgique : responsables d’espaces verts, techniciens agricoles, gestionnaires, apiculteurs, décideurs, naturalistes, associations de protection de la nature ou de sensibilisation du public...

Avec ces Assises, une première pierre est désormais posée pour créer un puissant mouvement collectif réunissant l’ensemble des spécialistes des insectes pollinisateurs, afin notamment de promouvoir la formation des futurs agriculteurs et agents d’espaces verts.

L’objectif est que la protection des insectes pollinisateurs soit un véritable motif de fierté pour chacun au travers d’actions concrètes : plantation d’arbres, arbustes et herbacées indigènes, désartificialisation des sols, changements de comportements alimentaires, de déplacements, transports...

À l’issue des Assises, un travail de synthèse a permis d’identifier les principaux freins à la préservation des insectes pollinisateurs, de proposer des leviers d’actions via des propositions concrètes, au travers d’un document de restitution remis à l’ensemble des participants et aux élus locaux, dont le président de la Métropole de Lyon, David Kimelfeld.

Changer de mode de consommation, cesser l’artificialisation des sols... !

Moins d’insectes sur nos pare-brise qu’autrefois ! Le constat est abrupt ; l’image est cependant évocatrice. Depuis plusieurs années, de nombreuses études menées par les chercheurs, le milieu associatif ou encore des agences inter-gouvernementales, démontrent toutes l’effondrement des populations d’insectes pollinisateurs, sur la planète, comme en France, parmi lesquels les abeilles. Une étude publiée en 2017 a mis en évidence la disparition de 80 % de la biomasse des insectes volants en Allemagne en moins de trente ans ! La baisse de production de miel est déjà un signe visible, mais la perte de pollinisation des cultures pourrait avoir des conséquences économiques majeures. En effet 75 % des cultures mondiales pour l’alimentation dépendent, au moins en partie, de la pollinisation par les insectes !

« Une étude a en effet estimé entre 200 et 490 milliards d’euros par an la valeur créée par les insectes pollinisateurs pour les espèces cultivées, soit entre 5 et 8% de la valeur de production alimentaire mondiale », a précisé Hugues Mouret, directeur scientifique d’ARTHROPOLOGIA, organisateur de l’événement, citant un rapport de l’IPBES de 2016. En termes d’actions concrètes, le naturaliste prône un changement radical des comportements d’achats des consommateurs. Il rappelle qu’après-guerre, un ménage consacrait 30 à 40% de ses revenus à l’alimentation, contre seulement 7% aujourd’hui. Son autre cheval de bataille : cesser l’artificialisation des sols. 23% de la biodiversité connue vit dans les sols et 70% des espèces d’abeilles sauvages y nichent.

Biodiversité : faire peur décourage ; rendre acteur mobilise et rend fier !

Les 250 naturalistes, biologistes, ingénieurs agronomes, responsables d’associations, et encore responsables des espaces verts se sont félicités de l’important travail qui a permis d’éveiller les consciences en s’appuyant sur des données objectives et quantifiables. Si ce travail scientifique d’inventaire et de recherche doit continuer, tous ont également admis qu’une plus grande transversalité doit se développer pour mener des actions communes de protection des insectes pollinisateurs aux côtés du grand public, des agriculteurs et des gestionnaires d’espaces verts. On retrouve en effet les insectes pollinisateurs aussi bien en milieu urbain que rural, dans les parcs urbains comme dans les forêts.

Décideurs locaux et spécialistes de la biodiversité ensemble pour agir !

Plutôt que de publier des conclusions alarmantes, mais néanmoins réelles !, sur le déclin des populations d’insectes pollinisateurs, ou de pointer du doigt les mauvaises habitudes, le déploiement d’une communication incitative et positive est sollicité par l’ensemble des participants.

« Connaissance et action sont indissociables ! » souligne le grand témoin des assises François Letourneux, vice-président du comité français de l’Union internationale pour la conservation de la Nature (UICN).

Par exemple, les acteurs publics font face aux résistances des citoyens lorsqu’ils souhaitent prendre des mesures en faveur de la protection de la biodiversité. Ils demandent à être accompagnés dans leur compréhension de la situation et leurs actions.

C’est l’appel qu’Éric Fournier, vice-président délégué à l’environnement de la région Auvergne-Rhône-Alpes et Bruno Charles, vice-président de la Métropole de Lyon délégué au développement durable ont lancé aux membres des Assises.

Comment mieux comprendre les injonctions contradictoires de la société, entre « déclinistes » d’une part et « ceux, de plus en plus nombreux, qui veulent changer les choses », d’autre part ? Comment amener les citoyens à changer ? « Nous sommes à la charnière historique d’une phase d’effondrement et de reconstruction. Cette reconstruction ne sera opérationnelle que si on fait bouger les choses en montrant que des solutions efficaces existent et en témoignant. Il n’y a pas de petite écologie ! » souligne Hugues Mouret. Les citoyens sont des ambassadeurs de la biodiversité et agissent déjà concrètement : jardins écologiques en milieu urbain, fleurissements des trottoirs, balcons et terrasses, reboisement, création de mares...

Pas de solutions envisageables avec les agriculteurs sans intégrer : les conséquences financières de tout changement de mode de culture

Les contraintes économiques et financières qui pèsent sur le monde agricole, liées essentiellement à la baisse de leurs revenus, les rend réticent à tout changement au niveau de méthodes de culture qui impacterait leur rendement. L’exemple de l’agriculteur passé d’une agriculture fortement consommatrice de pesticides à une agriculture raisonnée à l’aide des auxiliaires de culture (insectes qui se nourrissent de parasites et dont l’action permet de limiter l’usage des pesticides) et qui est en passe de se convertir à l’agriculture biologique montre que c’est possible ! Non seulement un travail a été réalisé pour maintenir les rendements de l’exploitation, mais plus encore, l’agriculteur retrouve aujourd’hui de la fierté à parler de ces méthodes culturales, recourant à l’utilisation d’auxiliaires.

L’avenir des insectes pollinisateurs passe en grande partie par un soutien et une collaboration urgente avec les agriculteurs, mais aussi par une éducation des citoyens en tant que consomm’acteurs. Et si les consommateurs achetaient certains produits directement chez l’agriculteur ?

En milieu urbain, l’enjeu majeur est de sensibiliser le grand public

Besançon et Lyon, deux villes en pointe dans la protection de la biodiversité au sein de leurs territoires, ont présenté leurs initiatives. Anne Vignot, adjointe déléguée aux espaces verts de la ville de Besançon et Alain Giordano, son homologue lyonnais, ont tous deux soutenu l’idée d’envisager les coûts liés à l’entretien des espaces verts de nos villes non pas comme un budget de fonctionnement, mais comme un budget d’investissement. Il s’agit de considérer la nature en ville comme un château à entretenir. Ils s’appuient largement sur l’expertise des associations et spécialistes de la biodiversité pour aménager les parcs et jardins de leurs villes, recourant notamment davantage aux prairies fleuries naturelles, qui nécessitent moins d’entretien tout en conservant un intérêt esthétique, souvent encore la première demande de leurs administrés. Ils replantent davantage d’espèces arbustives à fleurs, qui attirent les insectes pollinisateurs, telles que l’aubépine, le fusain, le prunelier, l’églantine... Pour mémoire, 2 millions de km de haies ont disparu en moins de 60 ans en France, soit 50 fois le tour de la Terre.

Freins et leviers d’actions pour protéger les insectes pollinisateurs

Les deux freins majeurs sont le manque de connaissance et de formation. Les autres freins : l’appréhension au changement de pratiques et le regard porté sur ces changements !

Quels que soient les milieux étudiés (agricoles, urbains, naturels ou aménagés), le déficit de connaissance des acteurs ressort comme un frein majeur à la promotion de la défense des insectes pollinisateurs. La majorité du public ignore le rôle des insectes pollinisateurs, aussi bien pour les espèces sauvages que pour les plantes cultivées.

La tendance est de privilégier des plantes exotiques et modifier (cultivars horticoles) pour des raisons esthétiques et financières au détriment d’un habitat accueillant et fonctionnel (gîte et couvert) pour les espèces indigènes, donc les insectes pollinisateurs.

Les professionnels, agriculteurs et agents d’entretien des espaces verts, plus avertis, manquent cependant de connaissances techniques et réglementaires sur la gestion des milieux semi-naturels...

Autre frein identifié, les cursus de formation de ces professionnels intègrent insuffisamment la question de la biodiversité et notamment des insectes pollinisateurs. Pour les urbains, les préoccupations esthétiques l’emportent cependant souvent sur des considérations plus nobles en faveur de la protection de la biodiversité.

Leviers d’actions : rassurer, fédérer les acteurs et rendre acteur

Les 250 spécialistes des insectes pollinisateurs réunis en Assises ont conscience du travail de communication à mettre en œuvre pour rassurer puis engager les différents acteurs, notamment pour que la protection de la biodiversité ne soit pas perçue comme une contrainte mais comme un défi valorisant à relever.

Même priorité auprès des agriculteurs, dont les solutions proposées en faveur des insectes pollinisateurs doivent intégrer une sécurisation du changement de pratiques qui devra s’inscrire dans la durée. Ceci afin d’accompagner les agriculteurs et équipes d’entretien des espaces verts dans la mise en place de nouvelles méthodes, qui peuvent occasionner des résistances au niveau de l’organisation du travail voire même des pertes de rentabilité, auxquelles les agriculteurs peuvent difficilement faire face, seuls. La mise en place d’un système de péréquation financière a même été abordé sur ce dernier point.

Pour le grand public, l’approche directe par l’intermédiaire d’associations semble être le levier le plus efficace, tels que des ateliers découverte avec les groupes scolaires, des sessions jardinage qui se multiplient au sein des écoles... Mais il est également nécessaire de re-former les professeurs, de modifier les programmes scolaires de l’Education Nationale et de l’Enseignement agricole pour qu’ils intègrent plus la sensibilisation et la protection de la biodiversité.

Pour Hugues Mouret, tous les moyens sont bons pour mettre la nature entre les mains des enfants, des adultes, des professionnels ou des élus, afin que leur vision de la biodiversité change : « mettre les mains dans la terre » reste le meilleur moyen de respecter la nature et de la protéger.

http://www.arthropologia.org/

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