Alors qu’il a à peine 40 ans, sa vie bascule. « Je suis rattrapé par la réalité de la vie : cancer, VIH, hépatite. Au lieu de gérer ma croissance professionnelle, j’ai dû gérer ma décroissance sociale », se souvient-il.
Des malades chroniques aujourd’hui experts et acteurs du système de santé « Mon parcours se résume entre un avant et un après. Cette situation est d’une extrême violence. Je me suis alors posé la question de savoir comment transformer ma faiblesse en force en connaissant mes maladies et comment vivre avec. » Il découvre l’empowerment, dans la littérature francophone le « pouvoir d’agir ». Chaque individu, chaque communauté, où qu’il se situe dans l’échelle sociale, possède des ressources et doit pouvoir les utiliser pour améliorer ses conditions d’existence et tracer la route vers plus d’équité.
Éric Salat découvre l’université des patients, Pierre et Marie Curie (UPMC), première université à proposer une offre de formation diplômante française en éducation thérapeutique ouverte aux patients. Des malades chroniques peuvent ainsi devenir experts de leur pathologie et acteurs du système de santé.
Aujourd’hui, il est en charge d’une formation diplômante de « démocratie en santé ». « J’en attends une montée en puissance de la parole des usagers du système de soins de façon plus démocratique. Ce diplôme doit donner la capacité à des gens de bonne volonté d’apprendre dans la bienveillance à changer une société autour de soi au travers du passage à la formation et à l’information. Pour moi, cette démarche est l’essence même de ma vie, elle m’a rendu ma fierté par rapport à tout ce que j’ai connu et surtout, je n’oublie pas que je suis un survivant ! »
« L’innovation thérapeutique et technologique a été telle que nous sommes passés de malade couché, à debout, en moins de 30 ans. Notre espérance de vie a explosé, notamment celle des personnes atteintes de cancers ou de pathologies qui entrainaient systématiquement une fin plus courte que la moyenne. Or sociologiquement, le problème n’a pas été anticipé, d’où la véritable nécessité des patients ressources pour, sans doute à terme, redonner un sens à la vie de personnes qui se demandent « mais pourquoi ai-je fait tout cela ».
La maladie n’est jamais anecdotique dans le parcours des personnes. A une époque où l’on parle de trans-humanisme et où l’on peut envisager de vivre 150 à 1 000 ans (selon le Dr Laurent Alexandre), il faut donner un sens à la vie. C’est en cela que les patients ressources, experts, pairs, usagers... sont nécessaires au système, il faut des intermédiations », affirme Eric Salat.